Engager une réflexion avec Emmanuel Lévinas à partir du concept de culture, c’est accepter de se laisser interpeller par une civilisation qui a connu la guerre, la faim et les souffrances, et qui s’interroge sur le sens à transmettre aux générations futures. L’époque de Lévinas est celle qui arrache l’humain à la totalité du lieu pour le situer de manière nouvelle dans l’espace de l’infinitude.

Confronté par son histoire biographique aux frontières qui séparent les peuples et qui définissent une nation par sa culture (dominante) et l’hégémonie de sa langue, Lévinas va s’attacher à questionner la signification de l’être humain avant toute culture.

Au nom de quel principe universel une culture peut-elle en pénétrer une autre pour coloniser et prétendre émanciper les esprits sur la base de l’assimilation ? Quel accueil convient-il de réserver à autrui qui se tient et s’exprime dans une culture différente ? Le foisonnement des cultures et la reconnaissance de leurs richesses est la manifestation sans équivoque d’une humanité qui se tient dans un espace et un temps autrement que la façon d’être soi. Dès lors, l’histoire et les cultures permettent d’accéder à la compréhension d’autrui et de soi.

La culture, c’est la « percée de l’humain dans la barbarie de l’être ». La culture, c’est la sortie de soi dans un dialogue sans équivoque avec autrui. Droiture et nudité de l’autre humain qui expose à la « culture comme responsabilité pour autrui ».

La lecture des oeuvres d'Emmanuel Lévinas, écrits philosophiques et talmudiques, nous apprend à laisser passer l'autre avant nous, à questionner de manière nouvelle sa propre culture, et à ne pas fuire la rencontre d'autrui dans le dialogue. Avec Lévinas, le non-désintéressement passe par le dialogue et la réponse apportée à l'interpellation du premier venu.

Le dialogue est un dialogue sur les Hauteurs parce qu'il permet la rencontre de personnes depuis le lieu de leur culture respective sans prétention à exercer un pouvoir sur autrui ou à le saisir main-tenant. L'épiphanie d'autrui naît dans la socialité à deux et se prolonge dans l'infinitude du tiers. Dialoguer, c'est refuser de tuer l'autre, de le nier dans la nouveauté et l'étrangeté de sa différence. Dialoguer c'est accueillir les droits de tout être humain et de tous les êtres humains.

Pour aller plus loin :

- Emmanuel Lévinas, Humanisme de l'autre homme, Paris.
- Emmanuel Lévinas, Détermination philosophique de l’idée de culture : Entre nous. Essais sur le penser-à-l'autre, Paris, 185-194.

Date de création : 31/12/2007 - 20:00
Dernière modification : 01/01/2008 - 16:41
Catégorie : Lévinas de A à Z
Page lue 6388 fois

 Prévisualiser la page      Imprimer la page