L'aventure éthique de la relation à l'autre homme Chez Levinas, la question du temps et de la temporalité semble faire partie d’un unique instant : celui d’une rupture de l’histoire où l’homme est arraché à son insouciance par l’état de guerre. 1941! -trou dans l'histoire- année où tous les dieux visibles nous avaients quittées, où dieu est véritablement mort ou retourné à son irrévélation. Un homme en prison continue à croire en un avenir irrévélé et invite à travailler dans le présent pour les choses les plus lointaines auxquelles le présent est un irrécusable démenti. Il y avait une vulgarité et une bassesse dans une action qui ne se conçoit que pour l'immédiat, c'est-à-dire, en fin de compte, pour notre vie. Et il y a une noblesse très grande dans l'énergie libérée de l'étreinte du présent. Agir pour des choses lointaines au moment où triomphait l'hitlérisme, aux heures sourdes de cette nuit sans heures -indépendamment de toute évaluation de "forces en présence"- c'est, sous doute, le sommet de la noblesse. E. Levinas, La signification et le sens (in Humanisme de l'autre homme) |
Monde en guerre... fin des institutions... toute la force de l'humanité naissante réside dans la capacité des survivants à enseigner les générations nouvelles. C'est là tout "l'injustifié privilège d'avoir survécu à six millions de morts." (E. Levinas, Avant-propos à Noms propres). Le temps est un espace où le sujet expérimente la rencontre avec autrui, dans la droiture du visage. Condition de l’existence humaine, le temps est opportunité de faire mémoire dans le présent d’un passé irréparable. Temps du survivant, il correspond à la durée de vie de chaque être humain dans son rapport aux autres. Unicité, singularité, conscience, angoisse, solitude, fatigue, paresse, ennui, le temps confronte le sujet à sa singularité et l’ouvre sur le temps des autres : espace social où le survivant prend conscience que l’être se construit dans la trace de l’Autre, dans l’effet de son passage. C'est pourquoi, chez Lévinas : il y a un temps pour la solitude de l'exister au stalag et la fraternité avec le règne animal, il y a le temps de l'altérité-contenu avec la féminité et celui de la paternité ouverte à tous les possibles de la filiation, il y a le temps de la responsabilité et de la présence de l'avenir. La réflexion sur le temps marque chez Levinas l’éveil de la conscience et une volonté responsable de s’arracher à la totalité anonyme de l’il y a tout en s’ouvrant au temps de l’Autre. Dans ce temps de la rencontre, la distance qui sépare des autres est proximité, nudité, visage, sensibilité, blessure, souffrance, non-indifférence, parce qu’elle sous-entend une tension intérieure qui témoigne d’un exister pour l’Autre. Parler de la conscience, c’est parler d’espace et de temps. Pour travailler la question du temps dans l’œuvre de Levinas : Texte de 1934 : Quelques réflexions sur la philosophie de l'histoire Texte de 1940 : L'oeuvre d'Edmond Husserl Texte de 1947 : De l'existence à l'existant Texte de 1947 : Le temps et l'Autre Texte de 1948 : L'ontologie dans le temporel Texte de 1961 : Totalité et Infini Texte de 1965 : Intentionalité et sensation Texte de 1975-1976 : Dieu, la Mort et le Temps Texte de 1983 : De l'un à l'autre. Transcendance et temps Texte de 1991 : La mort et le temps
Textes parus dans : De l’un à l’autre. Transcendance et temps in E. Levinas, Entre nous. Essais sur le penser-à-l’autre, Grasset, pp. 143-164. La solitude de l’être in E. Levinas, Ethique et infini. Dialogues avec Philippe Nemo, Fayard, pp. 47-54. E. Levinas, Le temps et l’autre, Quadrige, PUF. E. Levinas, La mort et le temps, L’Herne. E. Levinas, Dieu, la mort et le temps, Grasset, 1993 E. Levinas, De l'existence à l'existant, Vrin, 1993 E. Levinas, Totalité et infini ; cf. : chapitre « Au-delà du visage », « G. L’infini du temps ». E. Levinas, Autrement qu’être ou au-delà de l’essence ; cf. chapitre II « De l’intentionnalité au sentir », « temps et réminiscence » et « temps et Discours ». E. Levinas, Quelques réflexion sur la philosophie de l'histoire, Payot E. Levinas, En découvrant l'existence avec Husserl et Heidegger; cf. l'oeuvre d'Edmond Husserl, l'ontologie dans le temporel, Intentionalité et sensation.
Date de création : 30/10/2005 - 20:21
Dernière modification : 25/01/2006 - 21:56
Catégorie : Thèmes
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